jean-jacques schuhl ? -------- documents & textes ----------bibliographie_-------- liens


 

 

Sur Rose Poussière

par Charles von Strychnine
in Gonzaï

A l’heure où Nikos Alliagas est considéré par certains comme un dandy cathodique (la culture pop en est là…), il est urgent de trouver l’antidote, le filtre radical, antiseptique au goût de rose… Et l’antidote, c’est Schuhl qui, dès 1972, faisait preuve d’un dandysme à toute épreuve, bien plus concret que celui du grec à facettes.

De la couverture à son contenu, ce livre qu’est Rose Poussière est de bout en bout un objet d’art. Qui comme les gants du beau Brummell (nécessitant l’attention de trois ouvriers spéciaux, deux pour la main, et un pour le pouce) a eu besoin de cet auteur double voir triple qu’est Jean Jacques Schuhl

Ce livre est une sorte de cut-up à la francaise et Jean-Jacques Schuhl y est un voleur de mots, le roi des voleurs en quelque sorte.

Rose poussière est un roman pop et non pas populaire, bien au contraire. Roman snob, dans le sens le plus noble du terme, il est pop. Car, là où Warhol se fait toute une mythologie picturale, composée aussi bien de l’univers des superstars du rock que des stars de la factory célèbres le temps d’un screen test puis oubliées dans le gouffre de la mémoire collective, Schuhl utilise les mêmes obssesions pour la culture de masse. Même si ses goûts sont tout de même plus raffinés, oeuvrant pour la littérature avant tout.

Schuhl est un montreur, un anthologiste de l’underground francais qui nous présente son pantheon freak, Zouzou la twisteuse, Frankeinstein le dandy et bien d’autres.

Ce livre est le pendant livresque de la devanture des ivresses de Melmoth, même goût, mêmes references. Cette convergence d’idées voit son point culminant quand tous deux font une association d’idées entre Marlene Dietrich et les Rolling Stones… “Des hamburgers, des Rolling Stones, un sourire de Marlene Dietrich,” éructe le grand Melmoth dans sa mort multicolore.

Rose poussière est un manifeste, il est le pendant rose du petit livre rouge de Mao. Et, là où l’un prône la lutte des classes et le communisme, l’autre prône l’élégance du chaos et le rockn’roll…

Jean-Jacques Schuhl nous décrit le visage d’une jeune beauté dans les gravas d’un magasin et nous rend tous un peu necrophiles en nous faisant aimer cette morte. Il nous apprend comment devenir un adolescent électrique. On lit ce livre comme on sort en boite de nuit, on colle les mouvements de notre corps à son rythme, il nous enivre et c’est en sueur que l’on en sort …

Mais qui mieux qu’un auteur pour expliquer son livre?

« J’aimerais un jour parvenir à la morne platitude distante des catalogues de la Manufacture française d’armes et cycles de Saint-Étienne, du Comptoir commercial d’outillage, du Manuel de synthèse ostéologique de MM. Müller, Allgöwer, Willeneger, ou des vitrines du magasin de pompes funèbres Borniol (Ces beaux poncifs). En attendant, loin du compte, j’ai recopié des rouleaux de télex hippiques, France-Soir (Avec toutes ses éditions), des paroles de chansons anglaises connues, des dialogues d’anciens films célèbres, des prospectus pharmaceutiques, des publicités de mode, lambeaux sur lesquels, furtivement, s’écrit le temps mieux que dans les œuvres. Le reste, hélas, est de moi ; probablement. »

 

http://www.gonzai.com/jean-jacques-schuhl-rose-poussiere/

 

 

Ce site est administré par Bruno Deniel-Laurent